SUPERPOSITIONS, EMBUS ET REPENTIRS
Bernard Rouleau : "variation sur un portable", huile sur toile. 2004
Parfois, certaines parties du travail deviennent mates.
Cela s’appelle : un embu. Normalement, nous devons travailler selon le principe du "gras sur maigre", ce qui signifie que la couche du dessous doit toujours être moins huileuse que la suivante. Et surtout bien sèche. On ne le dira jamais assez. Une question se pose donc : comment reprendre une
peinture commencée sur le mode brillant et le conserver ?

Le mieux est de peindre en évitant
les embus. Nous allons maintenir notre travail dans le même
stade sur toute sa surface, en procédant par étape.
Le premier état sera celui du fond vinylique (Voir image ci-dessus)
Le second consiste à le peindre entièrement à l'huile pour une première couche. On huile toute la surface avec un médium contenant 25% d'huile de lin, térébenthine et médium Flamand. On laisse boire,. Au besoin on essuie la surface afin d'éviter les coulures. On refait à l'huile ce qui a été peint au vinyle ( J'ai déjà expliqué que l'huile ne pouvant être épaisse, on gagne du temps en passant par l'ébauche vinyle ).
Laisser sécher au moins quinze jours, puis dégraisser le travail au bois de Panama. On en profite pour éliminer les poils, les poussières, les épaisseurs.
Reprendre élément par élément pour fignoler le troisième état. Passer avec le doigt sur la zone choisie (par exemple ici l'encrier), le même médium que précédemment afin de ne pas travailler à sec, mais éviter les coulures. Ressuyer si nécessaire.

Troisième état, travail sur l'encrier. (03/08/2007) Ocre rouge, ocre jaune, puis rouge de cadmium et jaune de cadmium foncé.

On peut immédiatement passer à l'objet suivant :

03/08/2007, soir : Le rideau

Les pinceaux....(10/08/2007, matin)
Les pots... (Le 10/08/2007, après-midi)
Il reste encore beaucoup à faire, mais ça avance. On notera que j'ai laissé le "tableau dans le tableau" (Marseille-Montmartre) dans son état premier, vinylique, me réservant l'objet pour plus tard.
Un arrêt d'une petite semaine pour laisser sécher.
Je reconsidère le tableau le 15 août après l'avoir un peu oublié. Différentes petites choses apparaissent dans mon esprit. Je pense que le paysage d'arrière plan doit se situer plutôt de nuit, pour ne pas trop ressembler à une fenêtre, d'une part, et pour souligner encore le mystère. Le chandelier me paraît un peu épais. L'encrier est comme soulevé et n'est pas sur le même plan, ce qui va me permettre de glisser un clin d'oeil : qu'est-ce qui peut donc bien soulever l'amour ?
La journée du 16 août se passe sur le chandelier, dont j'affine, au passage, la silhouette, surveillant que les reflets correspondent bien aux points d'impact de la lumière. Tous les éléments du tableau sont l'objet d'un montage et par conséquent n'ont pas de réelle présence les uns pas rapport aux autres. C'est dans la répercussion des luminosités qu'on va la leur donner : chacun, surtout si il est brillant doit refléter l'autre.

Le chandelier
Le chandelier,jusqu'ici demeuré à l'état d'ébauche est à présent dans son premier état et vient rejoindre les pots, les pinceaux, le rideau et l'encrier. Nous restent : le couteau, les étiquettes sur les pots,

17/08/07 Le couteau à peindre.

17/08/07 La lumière sur les étiquettes. Un glacis de bleu sur les pots. Et le marbre, tranche et reflets.
Au matin du 18 août, je décide d'attaquer les paysage : la colline de la Bonne Mère mélangée du Sacré-Coeur. Comme la vue sera de nuit, je recouvre ladite colline de vinyle noir avec l'intention de dessiner le reste des immeubles au crayon blanc.

18/08/07 Le tableau dans le tableau (Marseille-Montmartre), préparation.

19/08 : dessin au crayon blanc

20/08 : Les bosquets à l'indigo

20/08 : La Bonne Mère au vinyle terre de sienne; ocre rouge et ocre jaune. Une pointe de jaune de Naples.

20/08 : Le sacré coeur. Même traitement, sans jaune de Naples.

le 21/08 Les flancs de collines. Indigo + outremer foncé, blanc de lithopone.

Le sacré-Coeur 1er état huile

2208 : La Bonne Mère, 1er état huile

2208 : Toute la colline, 1er état huile. Les mêmes couleurs qu'au vinyle.

L'ensemble tel qu'il se présente le 22 août 2007 à 22 heures,
après un Glacis de bleu outremer et laque de garance sur la tapisserie.
La flamme de la bougie est ébauchée.
Lorsque tous les éléments auront été retravaillés individuellement, nous seront en présence du troisième état, qui pourra éventuellement recevoir un glacis sur la totalité (pour unifier la teinte, par exemple) et détaillé plus finement.
Enfin, pour le quatrième état le rehaut s'attachera particulièrement aux lumières (assombrir par ici, ré éclaircir par là).
Le tableau doit être prêt pour la Toussaint. J'envisage encore trois semaines de travail, deux mois de séchage avant de vernir au vernis à retoucher. Le vernissage final aura lieu dans un an.
En tous cas, il ne faut jamais commencer à sec et attaquer directement
une partie sans ce préalable. Il faut également
que le travail de la séance précédente soit suffisamment
sec (quinze jours minimum).

Christophe Lecroart. Travail uniquement vinyle 2006
Le repentir nous indique qu'on ne peut pas masquer une erreur. Ainsi qu'un chat recouvre sa crotte d'un monticule de sciure, on devine la crotte au monticule. C'est ainsi qu'on voit des chevaux à cinq pattes, des personnages à trois bras.
Par conséquent, il nous est interdit de repeindre sur une ancienne toile.
Tout fond à l'huile remonte inexorablement.
La nécessité de tout bien penser avant s'impose donc. Bien des peintres exécutent d'abord le tableau en taille réduite, afin d'en tester l'équilibre, la dimension idéale, le rapport entre les divers éléments de la composition, sachant que rien ne se rattrape.
Si cela, malgré tout devait arriver, on serait drastique : on gratte jusqu'à l'os, on ponce et l'on repeint soigneusement. |