ESSAI DE TECHNIQUE IDÉALE
pour la peinture à l'huile

Les pinceaux, les blouses et la lumière.
L'atelier
2. Jean-Henri Cless
Un atelier d'artiste en 1804, dit L'atelier de David
Crayon, lavis d'encre et plume - 46,2 x 58,2 cm
Paris, Musée Carnavalet
Photo : Lifermann

Ici comme ailleurs, nous sommes victimes des clichés du XIXe siècle, via TF1. On voit le peintre affublé d’une blouse à col rond, des manches gigot idéales pour aller racler la toile, une palette de dix kilos au bout du bras, et des pinceaux de deux mètres, pour faire croire qu’il aime le recul, comme dans "La bohème ". Bref, l’usage rompt vite le cou a ces balivernes. Il faut se sentir bien. Tout doit être confortable, agréable. On doit absolument éviter tout effort inutile, tout geste dangereux qui renverserait le médium, l'huile et les essences. On doit être bien assis, face à sa toile, face à la partie qu'on travaille. Il ne faut ni s'étirer le cou ni s'effondrer dans les épaules. Le dos doit être maintenu.

Autre atelier

On ne doit jamais accepter d’être mal. Si la lumière ne convient pas, il faut faire en sorte qu’elle convienne : on bouge, on tourne, on invente. Beaucoup de peintres ont abandonné la canne au bout de cuir : cela déforme la toile et n’est pas pratique du tout. On préférera le "T " en balance, qui permet de poser la main au dessus de la toile, ou mieux, le cadre avec rail et "T " à roulettes et contrepoids, comme on le faisait à Venise. Quoiqu’il en soit, il suffit de se souvenir que peindre, contrairement aux clichés tenaces, n’est pas un martyre et ne doit jamais le devenir.
Quand on interrogeait Van Gogh sur sa "douleur " de peindre, il répondait que le seul moment où il ne souffrait pas était quand il peignait. Et c’est si vrai qu’on en oublierait le manger et le dormir quand on est passionné. Tous les passionnés vous le diront !
Les longues brosses n’ont d’utilité que parce qu’elles permettent le recul par rapport au travail. À partir du XVIIIe siècle, on a recherché la touche plus vive, plus enlevée. Le travail de Fragonard ou de Watteau, a ce titre, est édifiant. On ne cherche plus le détail, mais le mouvement et la touche en participe. Dans ce cas, on avait besoin de juger du travail avec un certain recul, d’où les longues brosses. Certains ont forcé le trait – comme c’est souvent le cas des suiveurs – et se sont faits fabriquer des manches de plus d’un mètre : il fallait une fourche pour soutenir leur bras. Mais bon. L’histoire ne se souvient souvent que de l’exagération : c’est aussi le cas de la peinture "en extérieur " avec les impressionnistes. Essayez et vous verrez ce qu’il faut en penser. On ne peut y faire que des pochades, a moins d’aimer les peintures à poils, à plumes ou à brindilles! Par conséquent, restons simples. Prenons ce qui est adapté et seulement ce qui est adapté. Un tablier est plus pratique qu'une blouse d'autant que dans notre technique, il n'y a aucune raison de jeter de le peinture sur les rideaux. Le geste est sobre, les flacons petits, la peinture économique. Tout est à l'intérieur, rien dans le spectacle.

dégoutante
exactement ce qu'il faut éviter

Retour au sommaire