Nancy

Impossible de parler de Nancy sans passer par Émile Gallé.

Pas seulement pour son oeuvre, au demeurant très considérable, mais également pour ses amis, sa "bande", artistes de toutes catégories : peintres, sculpteurs, architectes, ébenistes, maîtres verriers, décorateurs, céramistes qui, tous, ont contribués à faire naître l'Art Nouveau en France et promouvoir son intense créativité.

Émile Gallé est le Président fondateur de l'École de Nancy, dont Antonin Daum est vice-président, ainsi que Louis Majorelle.

Émile Gallé naît le 4 mai 1846 à Nancy. Son père, Charles Gallé , artiste peintre passionné par l'émail, a reçu par son mariage la responsabilité d' un magasin de porcelaines et cristaux à Nancy, qu'il fait fructifier avec un certain succès. Le jeune Émile est élevé dans la religion protestante et reçoit une éducation à la fois soignée et audacieuse par son éclectisme. Il a un précepteur particulier, fait ses humanités au lycée impérial de Nancy et obtient son baccalauréat ès-lettres. Il pratique le piano et se passionne pour la botanique. Un séjour d’un an à Weimar lui permet de se perfectionner en langue allemande. Ensuite il passe à l'apprentissage des métiers du verre et de la céramique auquel il adjoint de solides connaissances en ébenisterie.

À la suite du traité de Francfort en 1871, Nancy devient capitale de la Lorraine.
"C’est dans un contexte économique favorable qu’en 1877 Émile prend officiellement la direction des différents ateliers de travail du verre et de la céramique mis en place par son père dans diverses manufactures de la région. Il continue à travailler au sein de ces structures, mais dans un souci d’indépendance et de regroupement de l’ensemble de son activité, il crée à Nancy même, en 1885, ses propres ateliers d’ébénisterie puis, en 1894, sa cristallerie. En 1900, l’entreprise emploie près de deux cents personnes.
Le premier grand succès de l’artiste date de 1884, année de la huitième exposition de l’Union des arts décoratifs à Paris. À l’exposition universelle de 1889, il remporte un véritable triomphe. C’est le début d’une réputation internationale que confirme l’exposition universelle de 1900. Les multiples récompenses obtenues dans ces manifestations suscitent la reconnaissance des autorités : Gallé est fait chevalier de la Légion d’honneur en 1885, officier en 1889 et commandeur en 1900.

Artiste et industriel, Émile Gallé est aussi un citoyen engagé. Il ne cesse de protester contre l’annexion de l’Alsace-Lorraine et, convaincu dès la première heure de l’innocence du capitaine Dreyfus, se révèle jusqu’àla fin de sa vie un ardent dreyfusard : il compte parmi les membres--fondateurs,en 1898, de la section nancéienne de la ligue des droits de l’Homme et est élu en 1901 président de la fédération républicaine de Meurthe-et-Moselle. En 1901, il crée l’École de Nancy, alliance provinciale des industries d’art, afin de défendre, face à la concurrence étrangère, les intérêts des industriels lorrains et d’assurer le rayonnement de l’esthétique naturaliste qu’il a promue tout au long de sa carrière.
Il meurt de leucémie le 23 septembre 1904."

( cf Philippe Thiébaut. Conservateur en chef au musée d’Orsay)

Écouter L'Art Nouveau en France ici : http://www.canalacademie.com/emissions/carr043.mp3


C'est fort improprement qu'on parle de l'œuvre verrier d'Émile Gallé sous le nom de pâte de verre.

La pâte de verre désigne une technique consistant à garnir un moule de verres colorés pilés et à amener le tout à une température voisine de la température de fusion pour souder les grains. On démoule ensuite. La pâte de verre est une matière bulleuse, selon la granulométrie du verre utilisé, qui prend à la lumière un aspect cireux, mat, transluscide ou ponceux, comme le montrent les œuvres délicates de Charles Cros ou d'Argy Rousseau.
Gallé connait cette technique mais l'essentiel de sa production est soufflée, non pas en verre mais en cristal, c'est-à-dire avec adjonction de sels de plomb. À la paraison initiale de cristal, Gallé ajoute de nouvelles couches colorées d'oxydes métalliques ou d'inclusions, avant de souffler la pièce de cristal, de la retravailler ensuite d'inclusions nouvelles, d'appliques, de feuille d'or ou d'argent.
Au refroidissement, les différences de dilatation de ces différents couches sont la cause d'accidents très fréquents, l'ouverture des fours révélant une casse impressionnante, qui font la rareté des pièces réussies.Sorties de la halle de cristallerie, les pièces sont alors retravaillées par gravure, à la roue pour les plus précieuses, à l'acide fluorhydrique pour les plus courantes. On dégage ainsi un décor en camée, le plus souvent floral, rencontre heureuse des hasards du soufflage et du savoir faire des taillandiers.

lampes


Chaque pièce porte la signature de Gallé, avec des variantes qui donnent lieu à catalogue.

Après la mort de Gallé,en 1904, les verreries continuèrent à produire jusqu'en 1914. Sa signature est alors accompagnée d'une étoile, que des antiquaires peu scrupuleux n'hésitent pas à faire meuler. En fait, cette étoile n'a accompagné la signature dans les verreries que jusqu'en 1908 ; après cette année, pour avoir été considérée morbide par les appréciateurs de cet art, elle a été abolie.

Emile gallé


emile Gallé

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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L'Art Nouveau nait en Angleterre avec le mouvement Arts & Crafts, (Arts et Métiers) directement issu du groupe pré-Raphaelite avec William Morris et John Ruskin, tous deux membres de la confrérie Pré-Raphaelite fondée en 1848 à Londres.
Cet Art part d'une philosophie simple mais non simpliste édictée par John Ruskin : "On ne peut faire du bon travail, que si on vit et on travaille dans un environnement sain et agréable".
Des communautés d'artisans touchés par la justesse de la théorie quittent Londres pour aller s'installer près de la nature dans les districts campagnards. Cet exode est largement favorisé par le développement des chemins de fer. Dans ce nouveau courant vient une nouvelle curiosité : les ouvriers-artisans s'intéressent à la culture, participent à des concerts, fréquentent des théâtres. Ils découvrent la cuisine végétarienne Leur grande idée est que l'art doit intervenir partout et en tout premier lieu dans la maison  : vaisselle, argenterie, reliure, tapis, luminaires... idée fondatrice du design, en quelque sorte ! . Les créations sont réalisées soit sur commande en pièce unique, soit en petite série, diffusées dans les catalogues des magasins londoniens. L'Arts & Crafts est le premier à rapprocher les Beaux-Arts des arts appllqués.. Les artistes-artisans mettent en avant le matériau, les meubles se font en bois massif, le martelage de l'argenterie et de la dinanderie se fait à la main. Ils mettent en avant la simplicité voire le dépouillement, estimant qu'un beau mobilier se suffit à lui-même. Dans leurs œuvres, surgissent les végétaux et les animaux, symboles de la nature, plus ou moins stylisés.

Le mouvement se répand rapidement en Europe entre 1870 et 1880 pour atteintdre des villes importantes comme Paris, Bruxelles, Munich ou Prague ... Le nouvel intérêt des artistes et des artisans pour la vie quotidienne rencontre l'attrait du public pour la modernité, que ce soit dans les décors urbains ou à l'intérieur des maisons.
Il se répand si bien qu'il va toucher très vite tous les secteurs où la décoration joue un rôle. La tapisserie, la broderie, l'impression à la planche, l'émaillage, la dinanderie, la poterie, les teintures naturelles, les textiles, la marqueterie, l'ébénisterie, l'architecture, la bijouterie.(avec Lalique, notament).

Son influence va couvrir une période comprise entre 1848 et 1930.
je regroupe volontairement les Pré-Raphaelites, l'Art Nouveau (avec ses variations : Tiffany's, "Modern style", "Style Nouille", Liberty, etc ) et l'Art Deco de 1925. Quoi qu'on le lui conteste, Il s'agit du même courant. Un courant qui mèle l'hermetisme Chrétien Protestant à la culture Celte. Même si les formes se simplifient et s'assagissent, il s'agit malgré tout de la même philosophie "naturaliste". Ensuite on revient au classique Greco-Romain avec le IIIe Reich, Mussolini et Staline avec 'l'Homme surhumain". La vraie rupture n'interviendra qu'après la seconde guerre mondiale avec l'apparition du transistor du plastique et de "L'art moderne".

John everet Millais
John Everet Millais : Ophelie

William  Hunt
William Hunt : L'ombre de la mort

Les Pré-Raphaelites

La Confrérie des Pré-Raphaelite est constituée en 1848, dans la maison des parents de John Everet Millais en présence de ce dernier, de Dante-Gabriel Rossetti et William Holman Hunt.
Millais et Hunt sont étudiants à l'Academie Royale des Beaux-Arts de Londres, Rossetti est élève de Ford Maddox Brown, qui sera toujours symapthisant du groupe sans toutefois y adherer.

La philosophie Pré-Raphaelite tient en quatre déclarations :

  1. To have genuine ideas to express ;
  2. exprimer des idées originales ;
  3. To study Nature attentively, so as to know how to express them ;
  4. étudier la nature attentivement pour bien traduire ces mêmes idées originales ;
  5. To sympathise with what is direct and serious and heartfelt in previous art, to the exclusion of what is conventional and self-parodying and learned by rote ;
  6. considérer ce qui est appris par l'expérience et non par ouie-dire. Exclure toute idée préconçue ou conventionnelle.
  7. And, most indispensable of all, to produce thoroughly good pictures and statues.
  8. Et, le plus important : produire un bon travail technique.

Mais il faut retrouver le contexte de l'époque. Le début du 19e siècle est la plein moment de ce qu'on a appelé "Le Romantisme".

Selon Baudelaire au Salon de 1846 : « Le romantisme n’est précisément ni dans le choix des sujets ni dans la vérité exacte, mais dans la manière de sentir. Ils l’ont cherché en dehors, et c’est en dedans qu’il était seulement possible de le trouver. Pour moi, le romantisme est l’expression la plus récente, la plus actuelle du beau. Il y a autant de beautés qu’il y a de manières habituelles de chercher le bonheur. La philosophie du progrès explique ceci clairement; ainsi, comme il y a eu autant d’idéaux qu’il y a eu pour les peuples de façons de comprendre la morale, l’amour, la religion, etc., le romantisme ne consistera pas dans une exécution parfaite, mais dans une conception analogue à la morale du siècle. C’est parce que quelques-uns l’ont placé dans la perfection du métier que nous avons eu le rococo du romantisme, le plus insupportable de tous sans contredit. Il faut donc, avant tout, connaître les aspects de la nature et les situations de l’homme, que les artistes du passé ont dédaignés ou n’ont pas connus. Qui dit romantisme dit art moderne, – c’est-à-dire intimité, spiritualité, couleur, aspiration vers l’infini, exprimées par tous les moyens que contiennent les arts. »

Écouter Les préraphaelites ici : http://www.canalacademie.com/emissions/carr021.mp3

Rossetti
Dante Gabriel Rossetti




David
Jacques Louis David :
représentation conventieonnelle où plus personne ne comprend le sujet.

L'objet devient décor.

En littérature, cela reviendrait à avoir une bibliotheque pour "faire joli" et ne jamais lire....

 


Papier peint de William Morris

Avant quoi ? Avant qui ?

Mais il faut compter aussi avec les immenses champs de morts de l'Europe dévastée tant par les guerres Napoléoniennes que par les maladies, (Tuberculose et syphilis) ainsi que le doute émis sur le collectif.( Dont les révolutions ratées suivies de massacres) Les artistes, même lorsqu'ils sont au service des chefs et des puissants ne peuvent pas ne pas resentir le divorce entre "ce que l'on dit au peuple" et "ce que l'on dit entre soi". C'est à dire la "version officilelle" des faits et "la vérité selon soi". Selon l'expérience vécue, individuelle.

L'artiste est confronté à plusieurs siècles d'Art Officiel confiné dans la référence Greco-Romaine. Et l'Empire Napoléonnien en rajoute encore avec les compositions néo-classiques Davidiennes ou les évovations bibliques sont tellement convenues que plus personne ne comprend ce qu'elles illustrent et encore moins ce qu'elles signifient. Où donc a commençé cette déviation, cette lente dégradation du sens ? A partir de quel moment la convention a-t-elle remplacé l'expérience réelle, personnelle et directe ?

Or, dans son sens le plus vaste, le mot romantisme signifie conception de la vie relative au « Roman », conception dont on trouve l'expression dans les récits épiques des peuples Romans. Le romantisme ainsi compris est donc une mentalité d'inspiration chrétienne et nord-occidentale, par opposition à la mentalité antique et classique, d'inspiration païenne et d'origine gréco-latine. De cette mentalité Romantique sort un art cherchant à représenter l'infini, se portant volontiers vers l'inaccessible, le merveilleux, le fantastique, le mystérieux, tandis que l'art antique recherchait la raison, le calme, la simplicité, la noblesse, la clarté. Ce romantisme serait spécialement d'esprit moyenâgeux, avec ses sentiments profondément religieux, son enthousiasme pour une société chevaleresque, son amour du miraculeux ; il se soucierait plutôt de foi, de sentiment et de fantaisie que de critique, de raison, de mesure ; il serait en un mot l'expression de tendances absolument opposées à celles des anciens, raisonnables, moralistes et païens. l'homme est libre ; il ne dépend plus que de sa volonté et de la grâce divine, qui peut lui faire défaut, mais non le contraindre. La divinité désormais agit dans les cœurs, bien plus qu'elle n'intervient dans l'ordre physique des événements. L'homme devient une âme ; le corps perd son importance. La souffrance physique n'est plus un sujet de tragédie : . L'amour se dépouille si bien des sens qu'il devient parfois chimérique : c'est l'union et l'aspiration mutuelle de deux âmes à travers le temps, à travers l'espace, à travers la mort. La nature extérieure change d'aspect : elle est, comme l'homme, plus troublée, plus inquiète ; il y voit un reflet de son âme ; il la peuple, non plus de divinités occupées chacune de leur petit domaine, mais de puissances amies ou malfaisantes, de génies bons ou mauvais, fées, elfes, sylphes, gnomes, etc., personnifications variées du bon et du mauvais principe qui se disputent le monde.le romantisme est une sorte de language.


Raphael : la transfiguration
 
annonciation

Pré-Raphaelites parce qu'ils reprennent l'histoire avant l'intervention de Raphael et plus généralement de la Renaissance. J'ignore si le fait est avéré d'une perte du sens dans l'Art au profit du commerce, mais cela se pourrait bien. Cela se peut tellement qu'aujourd'hui la question en devient stupide. Le religieux, est un phénomène politique qui tient de la manipulation des masses et ne correspond plus du tout à une aventure intérieure vraie. (Il est vrai qu'elle n'est pas pour tout le monde). En tous cas, si elle existe encore, elle est bien cachée et n'est plus du tout rapportée ni par les journalistes ni par les artistes.

En attendant, observons le chef d'oeuvre de Filippo : il est à proprement parler un constat de compréhension.


"..pas pour tout le monde..."

Il s'agit donc de revenir à la source de l'inspiration Romantique en passant par la chevalerie d'Arthur et la foret de Brocéliande.
Ce qui n'exclut pas de revenir au Quatrocento italien où, par exemple, Filippo Lippi témoigne d'une véritable compréhension mystique, au contraire de Raphael, qui va céder au maniérisme et à la décoration. (d'où le terme "Pré - Raphaelite").

J'admets volontiers que du côté rationnel de la pensée, et pour l'être ordinaire, il n'y a aucune raison de comprendre ce que raconte Filippo Lippi avec son "Annonciation".
Il n'y a, en tous cas, aucune raison d'y voir quoi que ce soit d'autre que "La vierge Marie" recevant un Lys de la main de l'archange lui annonçant la venue du Messie. Qu'elle soit vétue de bleu, qu'elle reçoive une branche de Lys, que l'Archange se nomme Gabriel , que l'Esprit Saint plane au dessus du lit n'y change pas grand'chose.

Bref. Chacun croit voir quelque chose mais personne ne sait de quoi l'on parle exactement. Personne ne se pose d'ailleurs la question. On constate l'illustration d'une histoire présentée comme essentielle et qui cependant est à la base totalement contradictoire. On voit bien là mère, certes. mais la Vierge ? Est-ce qu'on peut êttre à la fois vierge et mère ?

Nos amis Pré-Raphaelites veulent retrouver l'innocence interrogative de l'avant Raphael. Lorsque l'Art entrait dans un monde cultivé, non encore marchand, réservé à une élite connaissante qui savait la couleur bleue liée à la mémoire, où le lys est la fleur d'une transmission sans détournement , où les Anges retrouvent leur racine grecque de "Messagers" spirituels. Et où l'ont connait au lieu de savoir.

Il faut tout revoir avec l'innocence de celui qui constate et s'interroge. C'est forcément blasphèmatoire.


La Trinité

La durée (l'éternité) -L'espace - l'évolution (Le temps)


Les Témoins spectateurs.


l'ange
Angelos = messager + Gabriel = la force

Raphael
Raphael. ("Eli est le guerisseur" )

 


marie
Le regard est sur la transmission

 

 

 

 

 

 

 

 

 

En tout état de cause, il est très intéressant de constater ce jeu de relais historique au travers de courants artistiques où l'on peut voir s'affronter - et se complèter - les mêmes caractéristiques de deux hemisphères du cerveau Humain qui vont culminer au 20e siècle avec Picasso d'un côté et salvador Dali de l'autre.
En attendant, la philosophie des Pré-Raphaelites se sera prolongée, au travers de toutes sortes de variations mondiales pendant presque un siècle et poursuit son travail souterrain....jusqu'aux "Matte painters" actuels.