SIMONE MERE

Née le 10 mai 1925, Simone mère n'est pas la première Simone Bénard. En effet, il y en a déjà eu une, dont la chevelure crépue et la lèvre charnue firent d'elle une interrogation vivante. De quel ancètre négroide était-elle issue ? Le mystére reste entier. 
Simone Bénard première, comme les arts sont "Premiers"

Bénard par alliance
A présent que j'ai vu toute sa vie, je peux deviner l'enfant qu'elle a été. Une petite fille totalement intimidée par l'existence et la vastitude des choses, une émotive butée qui ne peut être sûre de rien, qui ne peut avancer que par la confiance, une confiance forcément aveugle puisqu'elle repose sur l'Autre. Je l'imagine seule sur un plateau arride cherchant une silhouette à qui tendre la main, éperdue d'angoisse et d'espérance.
C'est là que je suis né : au carrefour de l'espérance. D'elle.
Elle voulait tout faire bien. En dehors des rails, tout lui échappait. Elle sentait la menace des conséquences planer au dessus d'elle. Conséquences terribles et inconnues venues du ciel comme les bombes embrasant Berlin. "Mais où tout cela a-t-il commencé?" Pourquoi le malheur ? Pourquoi faut-il que quelqu'un, toujours, piétine les fleurs ?
Il est des êtres que tout viole. Ils sont nés pour fleurir, pour sourire à la vie, s'épanouir dans la douceur des choses simples, sur un terrain balisé, sans surprise sans doute, mais tranquille et normal. Comme leur comprehension est égale à leur besoin, il n'y a pas de questionnement, pas d'interrogation, mais que des réponses : préparer le repas, allumer le feu, border le lit, calmer l'enfant qui pleure, consoler son mari au chômage, grapiller trois sous pour acheter du rosé, couper le melon en tranches, persuadée que Dieu l'a fait ainsi partagé pour le manger en famille.
Cette innocence, dans un monde tel que le nôtre, est mortelle. Que faire de sa douleur lorsqu'on est bon ? Les mauvais savent qu'en faire : ils la passent au voisin, se vident, se "défoulent". mais toi, tu épluches les pommes de terre et tu pleures dans ta cuisine.
ô, Simone. Tu étais si jolie. Tant d'envie de joie et d'aller danser dans ta robe légère, sans jamais oser passer outre.

1953
Son arène : 58 ans de cuisine. Deux enfants. Deux cancers du sein. Une dépression nerveuse. Un mari communiste en guise de toréador.
Elle nous quitte ce 23 mars 2005.
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